134 millions. C’est le nombre de podcasts écoutés en France, en septembre 2024 (selon une étude de Médiamétrie). Oui, juste sur un seul mois. En 2023, le nombre d’auditeurs réguliers était estimé à près de 465 millions dans le monde (contre 332 millions en 2020). Dans ces conditions, pas étonnant que l’audio s’impose comme le nouveau format star de la stratégie digitale. Il réinvente le brand content en apportant une dimension intime et engageante. Moins contraignant que des vidéos, plus interactif qu’un blog et plus moderne que la radio, le podcast captive par son accessibilité et sa flexibilité.
Popularisé par des chaînes de radio mettant en ligne des replays de leurs émissions, il a ensuite séduit les influenceurs et les solopreneurs. Depuis quelques années, c’est au tour des marques de se lancer sur la voie de la voix. Tout comme la newsletter ou le storytelling avant lui, le podcast de marque a prouvé son efficacité en tant qu’outil d’inbound marketing. Éducatif, informatif, divertissant… Il revêt plusieurs formes pour garder le contact avec le consommateur et en attirer de nouveaux. Alors à quoi doit-on ce succès exactement ? Est-ce vraiment rentable de se lancer dans le podcasting ? On rembobine le film et on vous explique comment les années 2020 se sont fait surnommer « l’âge d’or de l’audio ».
Évidemment, on ne commence pas une histoire sans avoir posé les bases. On n’est pas Georges Lucas. On va donc revenir sur la définition du podcast et ses origines avant d’analyser son évolution en France et dans le monde.
En 2004, un journaliste britannique invente le terme. Il assemble les mots « iPod », produit phare d’Apple, et « broadcast » (= le verbe « diffuser », en français). En France, le « podcast » fait son entrée dans le dictionnaire en 2007. Larousse le décrit comme une « émission de radio ou de télévision qu'un internaute peut télécharger et transférer sur un baladeur numérique. » On vous l’accorde, la définition a mal vieilli.
Aujourd’hui, il s’agit plus largement d’un contenu audio distribué en ligne, via différentes plateformes. On l’appelle aussi « baladodiffusion » au Québec.
Il faut bien faire la distinction entre le replay d’une émission de radio disponible en ligne et le podcast natif (non, vos vocaux de 10 minutes sur Whatsapp, ça ne compte pas). Ce dernier est une création originale destinée à la diffusion à la demande. C’est celui-ci qui nous intéresse particulièrement.
On pourrait presque dire qu’ARTE l’a inventé, mais sans le savoir. Ou en tout cas, sans utiliser ce terme. Souvenez-vous, en 2002, la chaîne européenne lançait ARTE Radio : une plateforme qui produit et diffuse, à la demande, du contenu audio natif (émissions, reportages, témoignages, etc.). Un concept innovant pour l’époque, qui séduit les auditeurs. La preuve ? 20 ans plus tard, la plateforme existe toujours et a reçu des récompenses telles que le prix Europa.
Dans les faits, l’essor du podcast s’articule autour de deux dates clés. La première ? 2005. Apple intègre les podcasts à iTunes. Une révolution. Grâce à un seul logiciel, on peut désormais gérer sa musique, mais aussi ses podcasts. Tout est accessible au même endroit : on écoute, on enregistre, on crée des playlists, on télécharge, on s’abonne… Ça simplifie la vie. Très vite, des radios comme RTL et Europe 1 intègrent le catalogue de la pomme pour proposer leurs émissions en différé. À partir de là, les journaux se penchent sur ce nouveau moyen de communication. Libération, par exemple, propose Le son du jour, puis Silence, on joue.
Du côté des amateurs, ça change la donne aussi. Des créateurs indépendants utilisent le podcast pour mettre en lumière leurs passions : cinéma, sport, culture, histoire… Les thèmes se multiplient tandis que certains réfléchissent pour transformer ce hobby en modèle économique viable. C’est ainsi que les premiers studios professionnels de podcasting voient le jour en France (comme NoWatch, en 2010).
2014, nouveau tournant. Aux États-Unis, le programme Serial cartonne. Sarah Koening, la réalisatrice, s’interroge sur une ancienne affaire de meurtre. En 1999, une lycéenne s’est fait tuer à Baltimore. L’enquête s’est soldée par l’arrestation et l’emprisonnement à vie de son ex-petit copain. Pourtant, la journaliste a des doutes. Elle utilise le podcast pour narrer sa contre-enquête. 12 épisodes qui reviennent sur ses conversations téléphoniques avec le détenu et détaillent ses réflexions sur l’affaire. Le succès est immédiat avec 5 millions de téléchargements en un mois. Serial ne ressemble à rien de ce qui existe à l’époque. Sarah Koening invite les auditeurs à réfléchir avec elle, déchaînant les foules sur les réseaux sociaux. Le podcast devient une référence et ouvre la voie au genre « true crime », très populaire aujourd’hui.
À partir de là, l’engouement est mondial et le podcast, incontournable. En France, les sociétés de production comme Louie ou Binge se multiplient. En 2022, on estime que 15 millions de Français en écoutaient au moins un par mois. Le ministère de la Culture soutient même la création via des bourses d’écriture. Partout autour du globe, c’est la même chose : Inde, Chili, Argentine, Pérou, Mexique… Personne n’y résiste. Même au Moyen-Orient, on dénombre environ 400 podcasts.
Dernière preuve de son omniprésence : il s’infiltre même dans la pop culture. Livres, films, séries télé… Dans And Just Like That, la suite de Sex And The City, Carrie Bradshaw a troqué son Mac contre un micro. Pareil dans la suite littéraire du roman PS. I Love You où l’enregistrement d’un épisode est au centre de l’intrigue. Même les plus jeunes s'y essaient dans la suite de Ghostbusters. Autre exemple : l’automne 2024 fut marqué par une nouveauté Netflix, Nobody Wants This. Cette série met en scène deux sœurs, co-animatrices d'un podcast. Et ce n’est pas un passe-temps, c'est leur métier.
Ce format offre une façon inédite d’exploiter le pouvoir de l’audio et de la voix. Forcément, face à un tel engouement, il n’a pas fallu attendre trop longtemps avant que les marques l'intègrent à leur stratégie digitale. Pour cela, 3 options :
Contrairement aux autres, le podcast de marque est spécifiquement conçu pour renforcer l’identité d’une entreprise. Il s'intègre parfaitement dans la stratégie digitale (communication et brand content) pour :
C’est un outil d’inbound marketing puissant pour faire venir les prospects à soi. En effet, dans un podcast de marque, cette dernière ne parle pas de ses produits, mais utilise le storytelling pour se connecter différemment avec sa cible. Aujourd’hui, de nombreuses marques ont sauté le pas. Mais quelle est vraiment la valeur ajoutée d’un podcast pour une entreprise ? Simple effet de mode ou réel bénéfice à en tirer, voilà la preuve par 7 que podcast et stratégie digitale font la paire.
Vous avez l’impression que tout le monde peut créer un podcast de nos jours ? Eh bien, c’est probablement parce que c’est le cas. En effet, d’un point de vue technique, cela ne nécessite que peu de matériel et donc peu d’investissement de départ.
De plus, comme souvent avec les stratégies de brand content, le contenu peut être facilement réutilisé. Un extrait d’épisode peut devenir un post sur les réseaux sociaux ou l’épisode tout entier peut faire l’objet d’une retranscription pour alimenter un blog. On peut également prévoir des rediffusions et multiplier les plateformes d’écoute. Bref, en termes d’optimisation et de ratio effort/bénéfice, c’est plutôt le bon plan.
Dans nos quotidiens surchargés, écouter une émission se veut plus accessible que de se poser devant un écran pour regarder une vidéo. Le podcast séduit également par son caractère nomade. Facile à consommer, il s’écoute partout, quand on veut, et surtout, peut être conjugué à autre chose : faire la cuisine, le ménage, du sport ou tout simplement pour optimiser le temps passé dans les transports en commun.
Les marques, qui ne savent plus comment capter l’attention de leur cible, auraient tort de le négliger. C’est ce qu’on appelle un média choisi, contrairement à la radio, par exemple. Sur les ondes ou même à la télévision, il n’y a pas de garantie d’audience. Le contenu est diffusé et on espère que le public sera là, au risque de se faire déprogrammer. L’animateur doit redoubler d’efforts pour éviter que l’on ne zappe. À l'inverse, le podcast est directement choisi par l’auditeur. Lorsque celui-ci clique sur play, c’est qu’il veut l’écouter jusqu’au bout (à moins que le contenu ne soit décevant, on ne va pas se mentir, ça arrive).
Par ailleurs, l’air de rien, la marque se fraie un chemin dans notre quotidien. Elle crée un RDV avec son audience, entre chaque épisode. En attendant, on continue d’y penser, on visite le site internet, on fait un tour en boutique… Bref, la marque nous reste en tête (« top of mind », si on veut se la jouer marketeux).
Dans les années 30, le président des États-Unis, Franklin D. Roosevelt, avait lancé ses « causeries au coin du feu ». Des discours radiophoniques dans lesquels le Président s’adressait sans détour au peuple Américain. Alors que la radio était encore un moyen de communication récent, il avait déjà bien saisi son pouvoir de proximité avec les auditeurs. Cela lui a permis de gagner davantage leur confiance.
De la même façon, le podcast de marque permet de s’adresser à sa cible de manière moins conventionnelle. Il humanise le discours de l’entreprise et l’incarne avec une voix, un ton, une façon de parler. Selon le format choisi, il peut renforcer l’attachement d’un client pour une marque grâce à un climat d’intimité unique. Sans compter que les auditeurs écoutent généralement leurs émissions préférées avec un casque ou des écouteurs. On leur parle directement au creux de l'oreille.
Les gens n’en peuvent plus des contenus ultra-léchés, retouchés, qui manquent de naturel. Ils en ont assez de la désinformation, des intox qui pullulent sur Internet. Ajoutez par-dessus tout ça l’intelligence artificielle et ses deepfakes, vous obtiendrez un consommateur méfiant et désabusé.
Le podcast offre un nouveau terrain de jeu aux entreprises, moins traditionnel. Il les aide à faire tomber le masque. Les marques peuvent raconter leur histoire de façon originale. Elles peuvent faire preuve de transparence pour conquérir de nouveaux prospects et fidéliser les anciens.
Le podcast est aussi idéal pour attirer différents segments de clients potentiels. D’un côté, par sa variété, que ce soit en termes de formats ou de sujets. De l’autre, car il s’agit d’un outil d’inclusion multigénérationnel.
Prenons l’exemple de la presse écrite. On le sait, aujourd’hui, les plus jeunes ne lisent plus le journal ni ne regardent les infos télévisées. Comment s’informent-ils ? Via Internet et les réseaux sociaux. Le podcast représente donc une opportunité pour la presse de renouer avec cette catégorie de la population. En 2017, le New York Times teste cette théorie en lançant The Daily. Bingo : très vite, de nombreux jeunes s’abonnent au programme et le téléchargent.
L’univers du podcasting séduit également les marques par les nombreuses possibilités qu’il offre en matière de branding. Un podcast de marque peut être éducatif, inspirant ou informatif. Il peut :
Ce média fondé sur l’affect et le partage de valeurs encourage les auditeurs à interagir (que ce soit en laissant un commentaire, en partageant le lien de l’épisode ou en achetant le service/le produit de la marque).
Par ailleurs, il permet au consommateur d'être plus attaché à la marque, le rendant ainsi plus susceptible de renouveler ses achats.
Ah oui, vous avez remarqué que l'argent ne figurait pas parmi les 7 raisons de lancer un podcast de marque ? Certes, il s’agit d’un point crucial, car ce média reste toujours gratuit (pour le moment, en tout cas). Qu’il soit produit par un solopreneur, un amateur ou un studio.
Mais alors comment gagne-t-on de l’argent avec un podcast ? Plusieurs options :
D’ailleurs, de nombreux solopreneurs choisissent de devélopper leur podcast pour diversifier leurs sources de revenus. Parmi les plus célèbres, on peut citer J’peux pas, j’ai business d’Aline Bartoli (@TheBBoost), InPower de Louise Aubry et Marketing Square de Caroline Mignaux.
Dans le brouhaha constant qu'est devenu le monde numérique, ce n'est pas facile de se faire entendre. Voilà pourquoi tout le monde sort un podcast de nos jours. Ce n'est pas juste « à la mode », ça peut rapporter gros. Et pas seulement en termes d'argent, vous l'aurez compris. Ce format devrait donc continuer de se développer. Désolé pour celles et ceux qui n'en peuvent déjà plus.